Pourquoi s’éloigne-t-on des personnes que l’on aime ?
Nous avons tous vécu, à un moment ou à un autre, la douloureuse expérience de voir une personne proche s’éloigner et disparaître de notre vie. Que ce soit au sein de notre famille, de notre cercle d’amis ou dans notre vie amoureuse, ces ruptures relationnelles laissent souvent un goût amer d’incompréhension et de tristesse.
Pourtant, il arrive que certains éloignements soient nécessaires, voire salutaires. Loin d’être toujours subis, ils peuvent dans certains cas être un choix conscient visant à se protéger ou à évoluer. Mais alors, comment comprendre et accepter ces départs qui nous affectent tant ? Faut-il courir après ceux qui nous quittent ou au contraire respecter leur choix et poursuivre notre route en solitaire ?
À travers cet article, nous tenterons d’apporter un éclairage bienveillant sur ce phénomène complexe qu’est la distance relationnelle, en explorant les motivations qui se cachent derrière et les attitudes à adopter pour surmonter ces épreuves avec sérénité.
Les différentes formes d’éloignement dans les relations humaines
Avant toute chose, il est important de bien cerner les différentes réalités que recouvre le terme générique « d’éloignement ». On peut distinguer :
- L’éloignement subi, lorsqu’une rupture ou une séparation nous est imposée contre notre volonté par l’autre personne ou par des circonstances extérieures (décès, déménagement, incarcération, etc.). C’est la forme la plus douloureuse d’éloignement car nous nous sentons abandonnés.
- L’éloignement choisi, lorsque nous décidons consciemment de prendre de la distance avec quelqu’un pour nous protéger d’une relation toxique, pour pouvoir évoluer ou tout simplement parce que nos chemins se séparent naturellement avec le temps. Cet éloignement est mieux vécu car il relève de notre propre choix.
- L’éloignement progressif, qui s’installe de manière insidieuse au fil du temps à cause d’un manque de communication, sans raison précise ni volonté délibérée de rupture. C’est par exemple le cas lorsque l’on perd petit à petit contact avec un ami.
Bien que douloureux, un éloignement n’est donc pas nécessairement synonyme de rejet ou d’abandon. Il peut également être le reflet d’un besoin légitime de distance pour préserver son bien-être, la marque d’une relation arrivée à son terme, ou encore la conséquence involontaire d’un laisser-aller. Adopter le bon état d’esprit face à une situation d’éloignement est essentiel pour bien la vivre.
Les motivations derrière un besoin de distance
Lorsque l’on subit l’éloignement d’un proche, la première réaction est bien souvent de se remettre en question : « Qu’ai-je fait de travers ? », « Pourquoi ne m’aime-t-il plus ? ». Pourtant, dans bien des cas, le besoin de distance exprimé par l’autre n’a rien à voir avec nous mais tout à voir avec lui. Il est donc essentiel de comprendre les motivations qui peuvent se cacher derrière avant de tirer des conclusions hâtives.
A. Se protéger d’une relation toxique ou néfaste
Parfois, certains liens relationnels peuvent devenir très toxiques ou destructeurs pour notre équilibre. Cela peut être le cas avec :
- Un manipulateur affectif qui sait comment nous faire souffrir
- Une personne negative qui épuise notre énergie vitale
- Un ami jaloux qui cherche constamment à nous rabaisser
- Un partenaire violent psychologiquement ou physiquement
Face à ce type de relations néfastes, l’éloignement est non seulement légitime mais même nécessaire pour se protéger. Il ne faut alors pas hésiter à couper les ponts, même si l’autre personne tente de nous faire culpabiliser. Notre bien-être doit primer.
B. Pouvoir évoluer librement et trouver son identité
Par ailleurs, le besoin impérieux de prendre ses distances est fréquent chez les adolescents et jeunes adultes. En effet, cette période de construction identitaire passe souvent par une phase de différenciation vis-à-vis de ses parents. Refuser leurs conseils, adopter des idées ou un style de vie différents, voire claquer la porte pour partir vivre seul, sont autant de manières inconscientes d’affirmer son indépendance et sa singularité.
Si elle est bien vécue, cette crise d’opposition permet au jeune de mûrir et de se définir plus clairement comme individu. L’éloignement temporaire du cocon familial, aussi douloureux soit-il, est donc nécessaire à cette quête d’autonomie.
C. La fin naturelle d’un cycle relationnel
Enfin, certains éloignements signent tout simplement la fin d’un cycle ou l’évolution naturelle d’un lien avec le temps. C’est notamment le cas avec l’éloignement progressif que l’on peut rencontrer au sein d’une fratrie ou entre amis d’enfance. Une fois les études terminées, lorsque chacun construit sa vie de son côté ou part vivre à l’étranger, il est normal que les liens se distendent petit à petit, sans que cela ne remette en cause l’affection mutuelle.
Comprendre que chaque relation a son tempo et ses saisons permet de mieux accepter ces éloignements subtils. Tout comme le dit le dicton, « Les amis de 20 ans ne sont pas les mêmes que les amis de 30 ans ».
Les différentes réactions face à un éloignement
Une situation d’éloignement provoque en général un mélange complexe d’émotions : tristesse, colère, incompréhension, sentiment d’abandon, voire de rejet. Pourtant, selon la nature de la relation et les circonstances de la rupture, nos réactions peuvent grandement varier. On distingue 5 cas de figure :
A. La résignation sereine
« Je respecte son choix et je n’ai aucune rancoeur ». Ce type de réaction sage et mesurée est malheureusement assez rare ! Pourtant, elle dénote une grande maturité affective et un détachement salutaire. Même si une séparation est toujours triste, accepter sereinement le choix de l’autre est une force.
B. Le soulagement
« Elle était toxique pour moi, son départ me libère ». Rompre avec une personne manipulatrice ou violente psychologiquement peut se révéler un immense soulagement, malgré la douleur de la rupture. Cela permet de tourner une page délétère de notre vie et d’envisager l’avenir sous un jour nouveau.
C. L’incompréhension
« Je ne saisis pas ce qui lui prend, pourquoi s’éloigne-t-il comme ça ? ». Face à un éloignement subit et sans explication, l’incompréhension prime. On se sent perdu, idiot, en manque de repères sur la relation. Des questions fussent de toutes parts sans réponses. Ce flou absolu ajoute à la détresse.
D. La colère
« Après tout ce que j’ai fait pour elle, voilà comment elle me remercie ! ». Un abandon brutal a souvent pour effet de réveiller une certaine amertume, mêlée à un sentiment d’injustice. Surtout si l’on estime avoir investi beaucoup dans la relation sans retour. La rancuneprotection vis à vis de ceux qui nous blessent.
E. Le chagrin
« J’ai tellement mal, je ne pourrai jamais l’oublier ». Enfin, dans bien des cas, c’est la tristesse qui prédomine face à une séparation. Perdre quelqu’un que l’on aime sincèrement est déchirant. Seul le temps et le travail de deuil permettent d’apaiser ces blessures affectives profondes.
Faut-il courir après ceux qui nous quittent ?
Lorsqu’une personne chère à notre cœur s’éloigne et disparaît de notre paysage du jour au lendemain, la première pulsion est souvent d’essayer de la retenir coûte que coûte. On la supplie de rester, on lui fait miroiter de beaux jours à venir ensemble, on lui jure qu’on peut changer ou s’améliorer. Pourtant, est-ce toujours la bonne solution ?
A. Respecter son choix…
Avant toute chose, il est essentiel de respecter le choix et la volonté de l’autre. Si une personne ressent le besoin de s’éloigner et d’interrompre une relation qui ne lui convient plus, elle doit pouvoir le faire librement sans être manipulée. Insister trop pour la retenir contre son gré reviendrait à nier ses besoins et à l’étouffer. Or cela conduirait rapidement à renforcer son désir de fuite.
B. …sans nourrir de faux espoirs
De plus, s’acharner à reconquérir coûte que coûte quelqu’un qui souhaite visiblement prendre ses distances est rarement payant à long terme. On risque de forcer un rapprochement de façade voué à l’échec, le temps que l’autre rassemble suffisamment de courage pour couper définitivement les ponts.
Il vaut donc mieux éviter les faux espoirs et les raccommodages factices, aussi douloureux que cela puisse être sur le moment. Cette personne ne reviendra probablement pas, du moins pas tant que ses motifs de rupture n’auront pas été résolus en profondeur.
C. Tourner la page pour renaître
Bien souvent, vouloir à tout prix rattraper quelqu’un qui s’éloigne revient à nourrir une relation déjà morte ou moribonde. Or s’accrocher désespérément à une histoire du passé nous empêche d’avancer et de nous ouvrir à de nouvelles rencontres.
Aussi paradoxal que cela puisse paraître, accepter de perdre quelqu’un que l’on aime permettrait en réalité de se retrouver soi-même. En effet, ce n’est qu’en faisant le deuil des relations du passé que l’on libère en nous de nouvelles énergies pour construire les liens de demain.
Comment surmonter un éloignement ?
Malgré toute notre bonne volonté, il n’est pas toujours facile de prendre du recul et de rationnaliser face à la perte d’un être cher. Voici quelques pistes pour traverser au mieux cette douloureuse épreuve :
A. S’accorder le droit de souffrir
Tout d’abord, après un éloignement brutal, il est normal de traverser les affres du manque et de la tristesse. Ne pas s’en vouloir pour ses larmes ni culpabiliser d’être dévasté. S’autoriser à exprimer son chagrin est le meilleur moyen de le metaboliser en vue de pouvoir tourner la page ensuite.
B. Chercher du soutien auprès de ses proches
Ensuite, il est essentiel de casser l’isolement en partageant sa peine avec des personnes de confiance : famille, amis, thérapeute… Exposer ce que l’on ressent permet de mieux comprendre et apprivoiser ce maelström émotionnel. Les conseils bienveillants d’un tiers sont aussi souvent très éclairants.
C. Réintroduire des activités motivantes
Malgré le cafard, continuer à prendre soin de soi en maintenant un minimum d’activités motivantes (sport, loisirs, sorties culturelles…) s’avère très bénéfique. Cela contribue à reconstruire l’estime de soi, si malmenée par une rupture ou un abandon.
D. Verbaliser ses ressentis par écrit
Enfin, tenir un journal intime ou écrire des lettres non envoyées permet d’évacuer toute la rancœur, la tristesse ou la colère emmagasinées. Ce travail d’écriture aide peu à peu à y voir plus clair en soi et à se libérer du poids du passé.
E. Accueillir ses émotions sans les fuir
Plutôt que de refouler sa souffrance, il est primordial de créer un espace en soi pour accueillir avec bienveillance toutes les émotions douloureuses générées par la séparation. Les laisser nous traverser sans jugement ni lutte permet de reprendre possession de son être.
F. Rester open à de nouvelles rencontres
Enfin, il peut être salvateur de continuer malgré tout à tisser de nouveaux liens, même superficiels. Sans forcer ni avoir d’attentes démesurées, s’ouvrir à d’autres horizons affectifs aide à relativiser l’éloignement subi et à retrouver confiance en soi.